Les sourds profonds oralistes qui deviennent bilingues

Les sourds profonds qui ont grandi dans l’oralisme pur et dur choisissent souvent d’apprendre la langue des signes à un moment donné, très souvent sur le tard, à 16 ou 35 ans. Sans doute parce qu’on est majeur, qu’on se libère enfin du joug de nos chers parents, qu’on prend enfin conscience de notre personnalité ou bien-être.

Eh bien, avec le temps qui passe, je m’en rends compte de plus en plus souvent. J’y ai pas mal réfléchi surtout car un copain qui va se reconnaître s’il lit ce billet, en a fait un débat sur son mur F******* et je dois dire que c’est un bon sujet.

Surtout pour les sourds oralistes comme moi.
Je me débrouille à peine avec la LSF (langue des signes pour les novices), j’ai oublié comment coder en LPC (langage parlé complété) et je lis sur les lèvres de tout le monde.

J’ai appris la LSF quand j’étais ado, je faisais la connaissance des sourds signants (je ne dis pas bilingues car certains ne voulaient pas oraliser avec les entendants), et je les fréquentais car certains entendants m’avaient extrêmement déçue. Puis j’ai compris que le fait d’être sourde oraliste m’apportait aussi autant sur le plan bien-être. Puis j’ai rencontré des sourds comme moi via une association des sourds oralistes qui s’appelle l’AFIDEO. Ensuite, j’ai rencontré celui qui est devenu mon mari entendant qui ne connaît rien au monde des sourds.

Dans mon parcours présenté comme tel, comment voulez-vous que j’apprenne davantage la langue des signes ?
Si mon chéri était bilingue, ma vie serait forcément différente, mes enfants signeraient peut-être.
Si je n’avais pas gardé mes amis entendants, je ne serais pas restée oraliste aussi longtemps.
Si mes amis sourds connaissaient tous la langue des signes et me signeraient tout le temps, je serais forcément devenue bilingue.
Au travail, j’aurais pu prendre un interprète en LSF, parce que c’est moins cher pour les entreprises ?

Mais tout ça, ce n’est pas arrivé.

C’est toute une suite de circonstances qui fait que je suis restée comme ça. Et je m’aperçois aussi que parmi mes amis sourds, il y en a qui résistent encore comme moi !

On nous bassine souvent avec la langue des signes mais si on n’a pas envie de l’apprendre, si on n’a que des connaissances qui ne la pratiquent pas, pourquoi se forcer ?
De plus, je suis encore à l’aise avec la langue orale. Peut-être un jour viendra, celui où je me lasserai d’oraliser, et l’envie de signer tout le temps me gagnera… à ce moment, je vous ferai signe !

4 réflexions au sujet de « Les sourds profonds oralistes qui deviennent bilingues »

  1. Maman et webdesigneuse

    Je suis du même avis que toi, étant aussi sourde appareillée oralisée. Je ne signe pas, bien que j’ai aussi appris quelques signes grâce à un ami interprète mais j’ai un peu oublié aussi. Je ne connais pas le LPC non plus. Et je lis souvent sur les lèvres (pour ne pas dire tout le temps en fait !).
    Et il ne m’est pas venu à l’idée d’apprendre la LSF car je suis dans un entourage où tout est oralisé (ou écrit, avec les sms, Skype, etc.).
    Mais parfois je m’interroge, si ça ne serait pas utile pour le boulot (si je souhaite par exemple enseigner pour des enfants sourds, bien que je ne sois pas enseignante, j’aimerais pouvoir travailler pour des enfants malentendants).
    Tu n’es donc pas seule sur ce coup 🙂

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    1. Laure Auteur de l’article

      et voilà, c’est quand on veut travailler dans le milieu des sourds, que la lsf s’impose d’elle-même… ce que je comprends parfaitement 🙂

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  2. Vivien

    Oh là là, je comprends parfaitement. Sourd de naissance, complètement oraliste, je n’ai eu connaissance de la LSF que vers 15 dans une association de vacances pour enfants sourds et entendants. Un pur bonheur. Mais après, j’ai continué dans le monde oraliste puis j’ai été professeur remplaçant en LSF pendant trois mois mais véritable échec puis j’ai abandonné complètement abandonné la LSF. Je ne voulais plus entendre parler.
    Je me suis marié avec une merveilleuse femme qui est orthophoniste et elle avait travaillé trois ans avec des enfants sourds. Quand mes piles sont mortes, on en profite pour signer un peu ou bien dans des contextes bruyantes. Et là, au niveau professionnel, je viens d’être embauché sur un poste de documentaliste sur la surdité. Toute mon équipe se forme en LSF donc je vais m’y mettre. Étrange, la vie, non?

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